Cette semaine, la députée Renaissance Caroline Janvier a soumis une proposition de loi (PPL) à l’Assemblée nationale. Au prétexte de protéger les plus jeunes enfants des « dangers » de la « surexposition aux écrans », ce texte constitue un monument de validisme. Analyse.
Une proposition de loi biaisée
Lien vers la proposition de loi : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/textes/l16b0757_proposition-loi
Sans surprise, le texte reprend pour l’essentiel un argumentaire développé par le Collectif Surexposition Ecran (COSE), collectif technophobe et validiste, composé entre autres d’enseignants réfractaires à l’inclusion des élèves neuro-atypiques. Le COSE s’est notamment illustré par son soutien indéfectible à Anne-Lise Ducanda, une pseudo lanceuse d’alerte qui a causé un mal considérable aux enfants autistes et à leurs parents avec sa vidéo virale de 2017, prétendant que l’exposition aux écrans rendrait autiste. À cause de cette vidéo, de nombreuses personnes autistes et leurs parents ont été culpabilisés par leurs enseignants et par des professionnels de la petite enfance, parce qu’ils utilisent les outils numériques.
L’argumentaire partial et technophobe de Caroline Janvier
Dans sa PPL, Caroline Janvier déroule une longue liste de méfaits « établis » imputés aux écrans, allant de troubles de la « relation à autrui » à l’insomnie, en passant par la diminution des « réflexes psychomoteurs ».
Elle ne cite en revanche aucune des études qui prouvent les effets bénéfiques des outils numériques sur l’autonomisation des personnes autistes, dyslexiques (pour lesquelles l’écriture manuscrite sera toujours très complexe), malvoyantes ou non-voyantes, ou encore sourdes de naissance. Ces personnes ne font tout simplement… pas partie de l’horizon de pensée de sa proposition de loi.
Une réalité qui en dit long, très long, en matière de validisme institutionnel !
Les outils numériques facilitent l’autonomisation : c’est prouvé !
Lorsque vous êtes non-verbal, ce qui est le cas d’une partie importante des personnes autistes, les outils numériques deviennent votre seul moyen de communication ! En priver les enfants jusqu’à l’âge de six ans, à travers des avertissements effrayant les parents, prive aussi ces enfants déjà victimes d’un validisme généralisé et d’une exclusion scolaire systémique de leur seul moyen de communiquer leurs besoins à autrui.
Il est bien dommage que Caroline Janvier n’ait pas su se renseigner auprès de personnes neurodivergentes ou en situation de handicap…
Quelques Sources
- Renaud, J. & Cherruault-Anouge, S. (2018). Applications numériques pour l’autonomie des personnes avec trouble du spectre de l’autisme: De la nécessité d’un processus d’innovation et d’une utilisation centrés sur la personne et ses aidants. Enfance, 1, 131-146. https://doi.org/10.3917/enf2.181.0131
- Plaisance, É. (2019). Le numérique par et pour l’éducation inclusive: Numérique et éducation inclusive Quelles alliances ? Conclusion du dossier. La nouvelle revue – Éducation et société inclusives, 87, 165-176. https://doi.org/10.3917/nresi.087.0165
- Jacquet, D. (2008). Les Tice au service des apprentissages des élèves handicapés mentaux: De l’outil spécifique à l’utilisation spécifique des outils. La nouvelle revue de l’adaptation et de la scolarisation, 43, 45-56. https://doi.org/10.3917/nras.043.0045
- Lacherez, A. (2008). L’accueil d’un élève malvoyant et la place des aides techniques dans sa scolarité. La nouvelle revue de l’adaptation et de la scolarisation, 43, 173-176. https://doi.org/10.3917/nras.043.0173