La neurodiversité France

Allié, aidant, et concerné

Un drame est survenu à Marseille. Un drame sur lequel notre association s’est déjà exprimée et a manifesté son soutien envers toutes les personnes qui en ont souffert.

Il ne devrait pas être nécessaire pour nous d’en reparler, mais seulement d’agir pour éviter que cela ne se reproduise.

Pourtant, nous reprenons la parole sur ce sujet, sur cette tragédie.

Nous reprenons la parole car des choses ignobles se produisent depuis. La mort d’un enfant n’a pas suffi, il fallait également l’expression de l’inhumanité de notre société.

Alors qu’après de nombreuses tragédies, les citoyennes et citoyens font montre d’une noblesse d’âme et d’une grandeur pour affronter les choses, cette fois-ci, ce n’est pas le cas. Alors que d’habitude, les médias font grand bruit, ici, ils se taisent ou relaient des idées nauséabondes. Il est temps que cela cesse.

La vraie victime, celle qui est morte n'existe plus !

Il n’aura pas fallu longtemps après le drame pour oublier la vraie victime. Cet enfant de 11 ans, déshumanisé, jamais nommé, parce qu’autiste, mort dans des circonstances effroyables, par la main de sa propre mère était à ce point écarté qu’il n’était même pas le sujet de sa propre mort.

Non le sujet, c’était celle qui a perpétré l’acte. Les médias, les associations, toutes les parties qui s’exprimaient ne mentionnaient que la maman. Jamais la victime. Et ce n’était pas pour questionner, ni analyser, manifester sa colère, son indignation ou son incompréhension. Non c’était pour la défendre, l’excuser, justifier son acte. L’enfant ne serait pas autiste, l’affaire ressemblerait à celle tristement célèbre de la famille Courjault. Ici, la victime est autiste et cela change tout.

Les aidants s’expriment et manifestent majoritairement sur les réseaux sociaux et dans les médias leur soutien à la maman. Que cela soit dans l’émission C à Vous, ou relayé dans l’article du site Handicap.fr les aidants, et prioritairement les parents, excusent, comprennent, justifient : « il faut être parent d’enfant autiste pour comprendre… », « Je ne veux pas blâmer la maman, elle était à bout… », « On n’est jamais aidés, c’est normal de craquer… ».

Les commentaires sont des centaines à s’exprimer de la sorte. La vraie victime, celle qui est morte n’existe plus. Elle est devenue coupable de son état. C’est parce que l’enfant était coupable d’autisme que la maman a craqué. C’est parce que son enfant avait d’autres besoins que les enfants jugés normaux, que la maman a craqué. C’est en substance ce que des parents expriment pour justifier le meurtre d’un enfant par sa propre mère.

Les commentaires ne tentent pas d’expliquer ou de comprendre, ils font pire…

Cela en dit long sur la considération que ces parents, aidants, ont pour les enfants autistes et pour les leurs propres. En effet, justifier cet acte chez autrui, serait-ce le justifier pour soi-même ? Les commentaires ne tentent pas d’expliquer ou de comprendre, ils font pire… Ils acceptent l’acte perpétré.

Et si l’on peut procéder à une analyse réfléchie, de ce drame, si l’on peut en effet porter une critique sur notre société, la juger coupable de ne pas aider les aidants, de ne pas donner les moyens aux familles pour vivre plus facilement les différentes situations,  la juger coupable de ne pas s’adapter et de fait générer de la souffrance chez les personnes concernées et leurs aidants, on ne peut, et on ne pourra jamais accepter le meurtre d’un enfant au seul prétexte qu’il est autiste ou qu’il a des besoins spécifiques.

Un aidant, ne doit jamais être une menace pour la personne qui dépend de lui. Nous anticipons le procès qui nous sera fait : au sein de notre association, nous sommes soit directement concernés soit aidants, parfois les deux, et nous sommes donc légitimes à nous exprimer sur ce sujet.

La diversité des opinions dans les médias

Accepter l’acte définitif qu’est le meurtre, développer un argumentaire pour rendre cet acte tolérable est la reconnaissance que c’est une solution et que le désespoir la rend possible.

Les associations de parents, les associations d’aidants, en défendant la maman comme c’est le cas actuellement, échouent. Accepter l’acte définitif qu’est le meurtre, développer un argumentaire pour rendre cet acte tolérable est la reconnaissance que c’est une solution et que le désespoir la rend possible. Dès lors, quelle légitimité ces associations ont elles à s’exprimer dans les combats des personnes dites en situation de handicap ? Plus aucune. Cette tragédie démontre que la défense des intérêts des aidants ne coïncide pas nécessairement avec la défense des intérêts des personnes dites en situation de handicap. Ces intérêts sont parfois opposés.

 

C’est précisément la différence entre aidant et allié. Les alliés sont les personnes qui considéreront toujours l’autodétermination et la défense des intérêts des personnes concernées comme prioritaires. On peut être aidant et allié. Malheureusement, depuis le drame survenu à Marseille, nous entendons peu les alliés. Et la majorité écrasante des aidants qui s’expriment ne sont malheureusement pas nos alliés.

Nous savons pourtant que la diversité des opinions est plus présente que ce qui persiste sur les réseaux sociaux et dans les médias. Nous avons que le prisme validiste est toujours le plus prompt à hurler au coeur de toutes les communications possibles.

Mais nous appelons ceux qui ont été vraiment choqués par ce drame, qui sont meurtris eux-mêmes par la disparition de cet enfant à le dire et faire face avec nous contre le déluge de propos horribles qui sont déversés.

Les personnes concernées, sont celles dites en situation de handicap. Comme nous, elles sont nombreuses à vivre avec douleur la situation. Beaucoup ont déclaré se sentir en danger suite à ce drame. En effet, si on accepte cette tragédie, si on la justifie, quelles sont les limites sur ce qui peut nous arriver, dès lors que nous sommes en situation de handicap ? Qui s’opposera à notre disparition si la société regarde ailleurs et que tant de personnes pleurent pour le coupable ?

Beaucoup d’autres personnes ont témoigné auprès de nos membres leur sidération, leur tristesse et leur colère. Nous ressentons nous aussi cette indignation, cette colère et ces émotions si violentes.

L'enfant est la victime ! La mère coupable ! La société est coupable !

L’enfant est la victime. La mère est coupable. La société est coupable de ne pas être adaptée au besoins des personnes, la société est coupable de son incapacité à considérer  l’enfant comme la victime intégrale de ce qui s’est produit. Il y aura un procès pour la maman, il n’y aura malheureusement pas de procès pour cette société inhumaine et violente, cette société inadaptée et discriminante. Il n’y aura pas non plus de réflexion sur ces associations et ces médias qui ont préféré compatir pour la maman et ne rien ressentir pour l’enfant. Il n’y aura pas non plus de questionnement sur le silence des politiques, d’habitude si prompts à tout commenter.

La Neurodiversité-France continuera à lutter pour que ce genre de choses ne se reproduise plus !

1 réflexion sur “Allié, aidant, et concerné”

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